Rethel – Givry

LA DEFENSE du secteur ATTIGNY-RETHEL
(14° Division d’Infanterie et groupe de chars lourds et légers)

La percée de SEDAN a été faite les 13 et 14 mai, puis le virage à angle droit le 14 à 13 h vers Saint Quentin, Abbeville et la Manche atteinte le 20. Si des combats de retardement ont eu lieu au début, à La Horgne, Bouvellemont, Faissault, etc… ce fut ensuite une résistance opiniâtre à toute avancée vers le Sud et Paris, un front se constituant le long du canal des Ardennes et de l’Aisne jusque Brienne sur Aisne pour ce qui concerne les Ardennes.

15 mai :
La 3° Brigade de Spahis composée du 2° Régiment de Spahis Marocains avec le colonel Geofroy et du 2° Régiment de Spahis Algériens avec le colonel Burnol est chargé de la défense du village de LA HORGNE.

La Horgne : Mémorial aux Spahis

A 9h30 se présente le 1° Schützenregiment de la 1° PzDivision (groupe Guderian) en sidecars et camions, accueillis par le feu nourri des armes lourdes et des 2 canons de 25 dont dispose chaque régiment. Dans l’incapacité de progresser, ils font appel à deux canons de 75 qui tentent de réduire le village. Mais rien n’y fait : Balk, leur chef, s’impatiente et fait appel à ses chars : 35 arrivent vers 16h30. Ils tentent d’encercler le village, sans y parvenir tant la résistance et les tirs du seul canon de 37 inséré dans l’église sont efficaces. Mais les munitions se raréfient et les troupes aussi. Les deux colonels sont tués au combat. Ceux qui restent tentent une sortie qui ne réussit qu’en partie. Les combats s’arrêtent vers 18 h : 31 morts allemands, 50 morts français, 86 prisonniers. Une dizaine de chars ont été partiellement détruits.

Pendant ce temps, la 14° Division d’Infanterie arrive progressivement : le 3° Bataillon du 152° RI est débarqué à Reims à 11 h et à 19 h, il est embarqué pour Mazerny. Parvenu à Novy-Chevrières, contrordre : il doit retourner à Rethel où il arrive vers minuit.
La mission donnée à cette division est d’assurer la défense de la vallée de l’Aisne d’en deçà d’Attigny à au-delà de Sault-les-Rethel, ainsi que le maintien d’une tête de pont à Rethel.
Le 2° Bataillon, avec ses 2 canons de 25 (antichars efficaces), est dirigé vers Poix-Terron. A 12h30, il se heurte à une attaque de blindés ennemis venant de Poix-Terron/Touligny qui encerclent la 5° Compagnie. Cette dernière se défend pied à pied avec ses deux canons de 25 (9 chars -et peut-être 13 ! – sont détruits) avant de se replier sur la ligne Hagnicourt/Mazerny vers 16 h.
Le 1er Bataillon, avec également 2 canons de 25 vient renforcer la défense de Bouvellemont, transformé en camp retranché par le 15° Régiment de Dragons Portés. Le village est attaqué de deux côtés : du Nord-Ouest par les troupes venant de La Horgne et de l’Ouest par la route des crêtes venant de Poix-Terron. Des antichars sont camouflés dans certaines maisons. Vers 16 h apparaît une file de Panzer et de véhicules venant de Poix-Terron. Un antichar bien camouflé en détruit 11. L’ennemi tente alors d’encercler le village mais il est repoussé par les automitrailleuses du 15° RDP. La partie Ouest de Bouvellemont est en flammes. De vifs combats s’y déroulent au Nord-Ouest et l’Oberst (colonel) Balk (1° PzDiv) doit payer de sa personne pour que ses troupes rompues de fatigue poursuivent leur effort.
A la nuit, l’ennemi atteint la ligne Puiseux/Faissault.
A 12 h 30, attaque de chars soutenus par l’aviation à Poix-Terron/Montigny où le 33° Bataillon de chars de combat équipé de FT 17 (ceux de 1917 !!) est chargé d’appuyer la résistance de l’infanterie autour de Poix-Terron. Or ces chars ont un armement insuffisant, un blindage inexistant, présentent un danger d’incendie permanent et sont constamment victimes de pannes : train de roulement, boite de vitesses, embrayages latéraux, alimentation en essence. Les 63 chars qui composent le bataillon commandé par le chef de Bataillon Mahé sont rapidement mis hors de combat : 32 sont perdus sur panne mécanique, abandonnés ou sabordés et 31 détruits par les tirs ennemis. 2 officiers et 60 hommes de troupe sont tués. Les nombreuses carcasses resteront longtemps sur le terrain, notamment autour de Jandun.
Sur la route de La Bascule au Chesne, commune de Mazerny, des troupes allemandes venant de Poix-Terron s’affrontent à un escadron du 208° Régiment d’Infanterie (53° DI) chargé de tenir la route sur 5 km. Il tente de ralentir la progression ennemie avant de recevoir un ordre de repli sur Mazerny/Hagnicourt. Une stèle a été érigée à leur mémoire.
A Faissault, 3 compagnies de la 3° demi-brigade de Chasseurs à pied sont chargées de la défense du village afin de ralentir l’avance ennemie. Des barricades sont élevées à l’entrée mais ne peuvent être fermées vu le flot continu de troupes qui refluent. Un groupe moto parti en reconnaissance se heurte à une colonne de chars lourds ennemis. Il fait rapidement demi-tour et vient alerter ses camarades. Les antichars sont mis en position. Le premier char qui apparaît écrase la frêle barricade ainsi que les chenillettes. Mais il est immobilisé par les tirs des canons de 25. Les autres chars arrivent et s’engage alors un duel entre chars et antichars. De nombreux servants sont tués mais immédiatement remplacés. 3 chars sont en flammes et 3 autres immobilisés. L’infanterie ennemie encercle le village mais elle est prise pour cible par les chasseurs installés dans les maisons. Tous les antichars sont finalement détruits. Les chasseurs s’accrochent aux maisons du Sud et sont au bord de l’épuisement quand ils constatent avec surprise le retrait de l’ennemi vers le Nord. Ce dernier a perdu la moitié de ses chars. Cette action retardatrice permet à nos troupes soit de repasser l’Aisne, soit d’arriver et de se mettre en position sur la rive gauche de la rivière.


Défense de Rethel :
Elle est assurée par la 14° Division d’Infanterie, commandée par le général Delattre (puis De Lattre). Composition : 35° Régiment d’Infanterie, 152° Régiment d’Infanterie, 3° Demi-Brigade de Chasseurs à pied (2° Bataillon+21° Bataillon+31° Bataillon) – 4° Régiment d’Artillerie Divisionnaire, 25° Groupe de Reconnaissance, Génie, Transmissions et Santé. Elle a le renfort d’un groupe de chars moyens et lourds composé de :
– la 3° Compagnie du 27° Bataillon de Chars de Combat appartenant à la 2° DCR, se repliant selon les instructions reçues et « empruntée » par De Lattre : chars B1bis Villers Bretonneux, Lunéville, Téméraire,
– un groupe de chars sortant de réparation, venus de Mourmelon le 20 mai et regroupés en une Compagnie sous la responsabilité du Lieutenant Gaudet : 14 chars B1bis,
– un char B1bis – le Rhin – du 41° BCC (3° DCR) qui, passant par Rethel à destination de Stonne, a été retenu arbitrairement par De Lattre.
Au total, 26 chars répartis aux différents endroits névralgiques en fonction des besoins. Leur présence et leur efficacité ont été fondamentales pour contenir les attaques allemandes.


Des renforts arrivent, malgré les attaques de Stuka, les ponts coupés et les entonnoirs sur les routes, le 152° RI en tête. Des barricades sont construites par endroits. A Rethel, des chars lourds sont postés aux entrées de la ville, côté Novion-Porcien, Novy et Amagne.
A 23 heures, ordre de repli derrière l’Aisne (ordre 5006/3 de De Lattre) tout en assurant une tête de pont à Rethel ainsi que la défense de l’Est de la ville.

16 mai :
Les préparatifs de la destruction des ponts de l’Aisne à Givry, Ambly, Seuil sont lancés.
La défense de Rethel s’organise avec le 152° RI :
– la 11° Compagnie avec un char B1bis aux lisières NE (route de Mézières)
– un peloton du 25° GRDI autour de la Sous-Préfecture
– la 9° Compagnie avec un groupe de mitrailleuses et un char B1bis couvrant la route de Novion-Porcien, le carrefour des cimetières civil et allemand. Tout est en place au début de la matinée. Un canon de 25 arrive en renfort dans l’après-midi.
– la 10° Compagnie prend position entre le pont du chemin de fer et l’écluse.
Vers 14 h, des motocyclistes allemands arrivent de la route d’Amagne et font demi-tour devant la barricade en place. Un engin blindé ennemi arrive sur la route de Nouvion suivi par d’autres éléments blindés et motocyclistes : ils observent la situation, échangent quelques tirs et disparaissent. Deux motocyclistes sont faits prisonniers.
A 21h, une auto est capturée avec un Lt Colonel porteur de documents : 2 Allemands sont tués et 2 autres faits prisonniers. Des automitrailleuses arrivant route de Novy et un convoi route d’Amagne sont détruits : 13 camionnettes pleines de matériel, 2 motos, une torpédo. De nombreux prisonniers sont capturés.
Devant cette activité débordante de l’ennemi, la défense de la rive gauche de l’Aisne et du canal est renforcée par l’implantation de chars, d’artillerie et d’infanterie.
Des attaques se produisent sur les hauteurs Ouest, au niveau des cimetières allemand et français. Elles sont contenues grâce à l’intervention de chars B.
Toute la 14° DI a repassé l’Aisne. Le 152° RI compte un certain nombre de pertes :
I/152 : 3 officiers, 15 sous-officiers, 112 hommes de troupe tués ou blessés
II/152 : 6 officiers, 22 sous-officiers, 223 hommes de troupe tués ou blessés.
6 disparus.

17 mai :
De nombreuses colonnes motorisées ennemies sont observées sur les routes du Nord, se dirigeant d’Est en Ouest.
La relève est assurée par le 35° régiment d’infanterie dans la nuit du 17 au 18.
A 9 h, route d’Amagne, 3 camionnettes remplies de troupes sont stoppées par des tirs de mitrailleuses.
9 h 30 : 2 automitrailleuses allemandes s’approchent du pont d’Ambly et ouvrent le feu. Nos troupes ripostent au canon de 25 et les font disparaître.
A 10 h 30 : route d’Amagne, une voiture et 1 side-car sont détruits.
Le B1bis Le TEMERAIRE est posté route de Launois.
13 h 30 : une colonne ennemie avance vers Rethel – Un char B1bis la prend pour cible et incendie un certain nombre de véhicules.
Les attaques sur les cimetières sont repoussées.
En début d’après-midi, des automitrailleuses apparaissent route d’Amagne. Des fantassins progressent route de Novy-Chevrières. Ils sont repoussés par notre infanterie appuyée par le B1bis VILLERS BRETONNEUX.
14 h 45 : violente attaque ennemie entre la voie ferrée (Sud) et les cimetières allemand et français au Nord et avance d’engins blindés sur la route d’Amagne, puis de side-cars, de motos et d’infanterie, tous bloqués par les tirs français. Quelques éléments sont capturés. En même temps, attaque de blindés venant de la route de Novion-Porcien : ils sont détruits par des canons de 25 et le B1 bis en position. L’ennemi riposte par l’intensification de l’activité de son artillerie, des minen, des mitrailleuses tirant avec des balles incendiaires suivie par une attaque de l’infanterie. L’ennemi progresse entre la voie ferrée et la route – Deux chars B1bis sont amenés en renfort mais le repli est ordonné sur le secteur de l’Hôtel de ville.
Trois points de résistance s’organisent à l’Ouest avec le 31° BCP :
….entre l’Aisne et l’Hôpital
….entre l’Hôpital et le carrefour des cimetières
….au-delà route de Novy.
18 h 15 : un véhicule ennemi fonce sur la barricade route de Novy : il est accueilli et détruit par la défense française. Même tentative avec un sidecar et une moto dont les équipages sont faits prisonniers.
19 h : une attaque de fantassins est repoussée avec l’appui de tirs d’artillerie et de mortiers.
A 20 h : route de Nouvion, 1 sidecar et 3 voitures qui tentent un passage en force sont détruits. Les munitions explosent.
21 h 30 : attaque générale : combats acharnés dans les deux cimetières par des troupes vraisemblablement droguées (Pervitin ?), se tenant par le bras, hurlant, éructant des menaces, attaquant à la grenade et à la mitraillette dans le clair-obscur. Ils progressent mais les 5° et 6° compagnies du 35° RI résistent vigoureusement et on en vient au corps à corps. Quelques automitrailleuses appuient l’attaque. La pression est énorme. Ravitaillées en munitions par des chars, nos troupes tiennent bon : mais le cimetière civil est cerné sur trois côtés. Des replis ont lieu, vu le nombre et la furie des attaquants. Vers 2 h, la pression se relâche. Une contre-attaque est aussitôt préparée et à 3 h 45 du matin, les cimetières sont réoccupés. L’ennemi a laissé beaucoup de cadavres et de matériel sur le terrain.
A souligner le rôle important joué par l’artillerie française : 75 – 105 – 155 (4° et 204° RA – le 123° ALCA tire plus de 5 000 obus ce jour-là). Une batterie de 155 détruit 5 chars allemands.
Mais certains de nos chars sont en proie à des difficultés d’huile (huile de ricin pour le Naeder des B1bis) ainsi qu’à une pénurie de munitions. PERETTE, un ancien de 14/18, file en sidecar à MOURMELON pour aller chercher l’huile de ricin qui manque sur place.
5 chars sont envoyés en renfort à ANNELLES.
(A noter que la 23° ID qui attaquait Rethel ne possédait aucun char, mais des automitrailleuses. Si quelques chars ont été présents, il ne pouvait s’agir que d’éléments de la 10° PzDiv venant de réparation et rejoignant le groupe Guderian progressant vers la côte- Lettre du général Pierre RENAULD du 5/1/1984)

18 mai :
Le II/52° RI défend la tête de pont avec le 35° Régiment d’Infanterie.
Vers 4 h, la 5° Compagnie du 35° RI, appuyée par un char B1 bis pénètre dans Rethel jusqu’au carrefour d’Amagne où une barricade a été installée. Ses 4 sections occupent les maisons bordant la route. Des corps français et allemands de la veille gisent encore sur place. Ces troupes qui dominent la situation tirent sur des véhicules ennemis qui viennent buter sur la barricade : motos, camions, voitures. Au soir, elle reçoit l’ordre de se replier et de gagner le centre de la ville.
Vers 7 h, des tentatives d’infiltrations entre l’Aisne et le canal ont lieu entre Château-Porcien et Pargny, secteur d’Acy.
Le 25° Groupe de Reconnaissance est envoyé en renfort et, vers 12 h, les positions sont reprises : les Allemands sont rejetés derrière l’Aisne.
Un avion allemand est abattu sur la rive du canal, entre Nanteuil et Taizy.
16 h : violent bombardement d’artillerie et attaques par vagues à l’Est de Rethel – Un de nos canons de 37 tire 500 obus ! Des combats meurtriers ont lieu en vue de la reprise du cimetière de Rethel. Ils redoublent vers 17 h. Cette attaque est stoppée mais le risque de contournement subsiste et le canon est endommagé.
Le B1bis LUNEVILLE détruit 2 antichars près du cimetière et le B1bis TEMERAIRE, placé au carrefour Ouest, détruit 3 camions de munitions qui explosent.
Vers 18 h 30, l’artillerie tire à vue sur une colonne ennemie progressant sur les hauteurs Nord de Rethel.
Appuyée par un char B1bis, la 6° Compagnie exécute un repli, d’abord sur le centre-ville puis derrière le canal.
A 19 h : les chars sont placés en protection près des ponts.
Au Nord, l’Ecole d’Agriculture est organisée défensivement avec le 25° GRDI ; un canon (37) est inséré dans un mur, en direction de la route de Novion.
Les restes des 5° et 6° Compagnies sont rassemblés au Nord du tunnel de Tagnon, occupé par le 35° RI.
A noter que le journaliste Joseph KESSEL vient au PC de De Lattre à Ville-sur-Retourne.

19 mai :
A 5 h 15, la 5° Compagnie du 35° RI et un char B1bis occupent la barricade, sortie NOVY. Le char refoule et détruit plusieurs camionnettes allemandes qui se présentent.
Dans la matinée, un char allemand suivi de 50 fantassins se profile sur les crêtes Ouest. Deux chars B interviennent et les obligent à se replier.
13 h : Bombardement par l’artillerie ennemie et interventions d’avions.
14 h : nouvelle attaque sur la barricade et le cimetière. Violents tirs d’artillerie et de mortiers y compris avec des obus incendiaires.
17 h 55 : la pression s’accroît ; plusieurs mitrailleuses sont détruites ; les munitions se raréfient. Plusieurs infiltrations ont lieu : le danger de débordements s’accentue. Un repli est obligatoire. Il se fait sur le centre-ville alors que des tentatives de contre-attaques ont lieu.
Le 35° RI assure la défense du cimetière allemand jusque 17 h. Au cimetière français, la défense est entamée car les pertes sont sévères.
L’ennemi occupe les hauteurs au-dessus du château. On assiste à un quasi-encerclement. Le repli est ordonné, d’abord sur le premier carrefour, puis sur le deuxième et sur la place de l’Hôtel de ville, enfin derrière l’Aisne. Ces replis successifs se font tout en contenant les attaques ennemies.
L’ordre est donné de faire sauter les ponts. A 20 h, celui du canal saute de manière imparfaite : il reste un passage pour des fantassins. Le pont de l’Aisne refuse de sauter car le cordon de mise à feu a été haché par les éclats d’obus et de bombes.
Quand le char CANTAL (37° BCC) arrive le soir cote 166 à la crête Sud de Rethel, il découvre un spectacle hors du commun : partout des incendies, des fusées, des départs de tirs d’artillerie française et allemande.
AMBLY-FLEURY, et GIVRY subissent des tirs d’artillerie préparant sans doute des tentatives de franchissement. Des reconnaissances françaises sont envoyées au Nord de l’Aisne.

20 mai :
L’artillerie ennemie bombarde systématiquement les rives du canal. Des groupes ennemis tentent de s’infiltrer et de le franchir sur les ruines de ponts plus ou moins bien détruits.
Des tirs d’artillerie sont demandés pour détruire définitivement le pont du chemin de fer.
L’après-midi, l’ennemi impose un intense bombardement sur la rive Sud du canal.
Ordre est donné au 152° RI de reprendre le terrain entre l’Aisne et le canal et de détruire le pont sur l’Aisne qui est toujours intact avec ses charges en place.
Le 25° GRDI et une section du 15° RTA défendent Taizy, Nanteuil, Acy qui est aux 2/3 détruit par les bombardements.
Le char VILLERS BRETONNEUX remonte dans Rethel en se dirigeant vers le Nord. Il tire sur des troupes ennemies, détruit deux automitrailleuses et oblige un Panzer IV à se replier. Il revient sur la rive Sud le soir, en passant sur le pont.
21 prisonniers allemands sont capturés ce jour-là.
Deux chars B sont placés en surveillance : un au pont du canal, un au pont du chemin de fer.
Le CANTAL est en position au chemin de halage, en appui de l’infanterie. Il restera trois jours sur place, assez isolé.
Au soir du 20 mai, la plus grande partie de Rethel située au Nord du canal est aux mains de l’ennemi. Le rapport du médecin-chef de la 23° ID relève, pour les combats de Rethel des 19 et 20 mai : 13 tués (dont 2 officiers),49 blessés (dont 1 officier), 4 hommes disparus.

L’artillerie française ajuste ses tirs sur des concentrations allemandes repérées au Nord de Rethel, leur causant des pertes assez importantes.
Un groupe de 14 chars vient de Mourmelon sous les ordres du Lieutenant Gaudet (37° BCC) : on l’appellera le groupe Gaudet. Ce sont des chars en révision qui viennent de différentes unités : 8° BCC -15° BCC – 41° BCC + 5 isolés. Cela permet la relève de certains chars en place depuis le début : 4 chars à Rethel – 1 à Biermes – 1 à Thugny – 2 à Annelles – 1 char est en panne à Mesnil-Annelles (problème de révision, d’huile de ricin (Naeder), de ravitaillement et de fatigue). Les équipages sont également relevés par les hommes frais qui arrivent (37° et 28° BCC).

21 mai :
5 h : à Rethel, les Français dégagent la rive droite de l’Aisne et repoussent momentanément l’ennemi vers le Nord avec l’appui des chars VILLERS BRETONNEUX et TÉMÉRAIRE. Ces actions sont exécutées par le 152° RI + 1/151° RI + GRDI 25 avec l’appui de l’artillerie.
A Acy, les emplacements des canons de 25 et des mortiers, repérés par le mouchard, sont la cible de l’artillerie, des mortiers et de l’aviation allemandes.
TAIZY subit un bombardement ennemi.
Au soir : repli général derrière l’Aisne. Le pont du canal est protégé par les chars AMIENS et FRANCE. L’artillerie française (4° et 204° RA) observe des lueurs de départs de tirs au Nord de Rethel. Elle déclenche des tirs sur ces endroits.
Le char RHIN est envoyé à SEUIL/THUGNY-TRUGNY en relève du JURA.
On procède à la relève des équipages des chars Téméraire – Lunéville – Villers Bretonneux, Flamberge, Jura, Verdun, Cantal.

22 mai :
Le I/152° RI est relevé par le 2° Bataillon de Chasseurs Portés.
Relève du 8° Bataillon de Chars de Combat qui se rend le soir à La-Neuville-en-Tourne-à-Fuy.
Au matin, un obus de 105 percute le char CANTAL (37° BCC) : 1 mort + 1 blessé. A 5 h : incendie du FRANCE – Le chef de char blessé, est évacué – 1 mort.
Pendant la nuit, un canon de 105 a été installé dans une maison par les Allemands.
A 6 h : tirs sur les chars CANTAL et AMIENS dans la rue principale, à 100 m du pont du canal. Le char AMIENS anéantit la pièce au 47 mais le pilote du CANTAL est tué et l’aide-pilote blessé.
Au soir, l’état des chars est le suivant :
à Rethel…..AMIENS a une chenille coupée
……………….CANTAL a une chenille coupée
……………….TÉMÉRAIRE a une fuite au Naeder
……………….Le FLAMBERGE est envoyé en réparation.
Le FRANCE a été incendié.
Le MULHOUSE est posté à Thugny-Trugny, le RHIN à Seuil, le JURA à Biermes.
Cinq chars sont en réparation près de La-Neuville-en-Tourne-à-Fuy.

23 mai :
Réorganisation des secteurs en vue de faire face à toute attaque : nouveau positionnement des canons, des chars et de l’infanterie. « L’ennemi tient tous les ponts de Rethel. Il y dispose en plus d’un excellent observatoire, le château d’eau. » (R Marcy)
Des patrouilles vont régulièrement jusqu’à l’Aisne pour garder le contact.
Le MULHOUSE est envoyé à l’atelier et remplacé par le POITOU.
Préparatifs d’une attaque (vers l’Est) à partir de Saulces-Champenoises – Le B1 bis VERDUN doit l’accompagner mais il tombe en panne, doit réparer et arrive après coup.
Au PC de la 14° DI, le Lt ROBERT fait le bilan des destructions réalisées par le groupe de ses chars : 12 motos détruites, 10 voitures, 16 camions, 7 automitrailleuses, 20 chars.
L’ennemi se calme et entreprend des travaux défensifs.
A GIVRY : Les restes des 5° et 6° compagnies (18 hommes) du 35° RI relèvent la 1° compagnie à Montmarin. Des rafales de mortier arrivent régulièrement faisant des victimes. Des hommes traversent l’Aisne en barque et attaquent l’ennemi pour l’obliger à reculer. On déplore plusieurs tués ; une barque surchargée coule avec hommes et matériel : 4 noyés. Mais 26 Allemands sont faits prisonniers alors que restent sur le terrain 16 tués et 6 blessés ennemis. De nouvelles attaques ennemies ont lieu l’après-midi, repoussées à chaque fois par des tirs nourris : elles sont contraintes au repli. 45, puis 37 et 62 ennemis sont capturés et un important matériel est récupéré. La 3° compagnie qui occupe la ferme du Bois de Seuil se laisse surprendre et encercler. Elle résiste et parvient à ramener presque tous ses hommes sur la rive Sud du canal.
Le 10, à GIVRY, l’ennemi relance l’attaque et les bombardements : l’église et son clocher sont détruits, des incendies se développent. Cela dure toute la journée. S’y ajoute un bombardement aérien creusant d’énormes entonnoirs. Un ordre de repli sur Pauvres/Cauroy arrive à la tombée de la nuit. La 5° compagnie compte 6 tués et 23 blessés. 19 citations seront attribuées. (témoignage du Lieutenant Pelloli)

24 mai :
Journée calme.

25 Mai :
Journée calme.
Des patrouilles françaises se succèdent dans les zones de possibles franchissements de l’Aisne : à Sault, Acy, Thugny-Trugny, Ambly et Attigny.

26 mai :
On procède à la vérification des positions défensives le long de l’Aisne : les points d’appui sont renforcés. De l’artillerie est mise en place dans le secteur de Perthes. Le char FLAMBERGE prend position à Saulces-Champenoises. Le char AMIENS est partiellement réparé : il peut se maintenant se déplacer.

27 mai :
Des reconnaissances sont envoyées dans Rethel afin de maintenir une certaine atmosphère d’insécurité chez l’ennemi et de repérer ses positions. Elles permettent aussi de ramener des prisonniers.
TÉMÉRAIRE (Naeder) et CANTAL sont dépannés avec des éléments du FRANCE incendié.
Thugny-Trugny est la cible de 150 tirs d’artillerie.

28 mai :
Reconnaissances de nuit. L’ennemi poursuit ses travaux défensifs.
Position des chars :
A Saulces : TROMBE-FLAMBERGE-MULHOUSE
A Seuil : RHIN
À Thugny-Trugny : POITOU
À Acy : VERDUN-ALSACE
AMIENS est en atelier de réparation
A Rethel, dans la nuit du 28 au 29 : VILLERS BRETONNEUX est relevé par ALSACE, TÉMÉRAIRE par VERDUN, CANTAL est en panne.
Un bilan des effectifs est établi : du 13 au 28 mai, les pertes se montent à 43 tués, 344 disparus, 166 blessés, 49 malades, au total : 592.

29 mai :
L’artillerie et l’aviation ennemies se montrent très actives.


La IV° Armée (général REQUIN- PC au Sud de Châlons) comprend le 7° Corps d’Armée (général Demazes) et le 23° Corps d’Armée composé de la 2° DI, la 10° DI, la 14° DI. Le groupement cuirassé Buisson le rejoint le 9 juin.


30 mai :
Le pont du chemin de fer sur le canal saute à 1 h 30 : le tablier s’effondre, rendant tout passage de véhicules impossible.
Le CANTAL reste à 500 m du pont principal car le jour se lève….
Une patrouille du 2° BCP explore l’espace entre le canal et l’Aisne à SAULT, juste après l’explosion et avance jusqu’à la voie ferrée : aucune réaction de l’ennemi. Retour à 3 h 30.
Une 2° patrouille avance vers l’hôtel de ville, trouve le secteur assez vide mais subit des tirs de mitrailleuses venant du château d’eau.
Partant d’ACY, entre 5 et 6 h, des patrouilles du 152° RI traversent l’Aisne, sans réaction de l’ennemi.
A 18 h 30, des tirs d’artillerie sont déclenchés sur des groupes ennemis repérés place de l’Hôtel de Ville. Une mitrailleuse allemande est détruite à 50 m Est du pont. La patrouille tente de récupérer des documents sur un officier ennemi blessé mais cela entraîne une vive réaction : c’est un échec qui entraîne un retour précipité. Des invectives jaillissent entre Allemands et Français pendant dix minutes…
Thugny-Trugny subit des tirs de mortiers.
Le char VERDUN est posté au pont de Rethel.
Le char AMIENS part en réparation : il a reçu trois obus de 105 dont un a la pointe coincée dans la boîte du mécanisme.
L’artillerie française pilonne des rassemblements de blindés allemands qui se dispersent rapidement.
A SEUIL, au-delà de Trugny, Ferme de Seuil, le 35° RI occupe la ferme du Bois de Seuil à 17 h ce qui déclenche peu après des tirs d’artillerie ennemis. Une reconnaissance est envoyée sur Amagne.

31 mai :
Relève du 152° RI par le 127° RI. Le 2° BCP retourne à la demi-brigade.
A 3 h 15, attaque de la ferme du Bois de Seuil par une compagnie allemande. Les bâtiments sont en feu – Les échanges de tirs sont meurtriers : de nombreux assaillants restent au sol.
Un de nos groupes se replie sur la rivière et revient vers 4 h 30 tandis qu’un autre reste encerclé. Des renforts ennemis arrivent et se lancent à l’assaut. Les tirs de nos FM leur causent de nombreuses pertes et les obligent à un repli. Une seconde vague leur succède et subit le même sort.
7h45 : une contre-attaque française est lancée par le pont d’Ailly mais elle se heurte à de violents feux ennemis et doit se replier. Des tirs de mortier prennent la ferme comme cible. Le 1er étage est détruit. Un assaut est repoussé.
Un canon de 47 est mis en œuvre par nos troupes mais les tirs à courte distance sont difficiles à maîtriser. Le Lt Gehin et 9 hommes sont tués, 4 sont blessés.
13h30 : une contre-attaque française est lancée avec l’appui de l’artillerie. A 15 h : la liaison est faite. On relève 70 corps allemands autour de la ferme. Il est finalement décidé de se replier avec toutes les armes.


La 2° DI (le Lion des Flandres) se trouvait devant la ligne Maginot. Composition : 33° RI – 73° RI -127° RI – 34° RA – 234° RALD – 11° GRDI.
Elle est alertée le 24 mai pour se porter sur la Retourne. Mais on manque de moyens de transport : une partie fera le voyage en train, l’autre avec des véhicules. L’embarquement en train se termine le 27. Mais les gares de Vitry-le-François et de Châlons viennent d’être bombardées, ce qui entraîne des retards. Concernant la colonne véhicules : elle ne peut voyager que de nuit et les nuits sont courtes ! Les premiers camions arrivent sur la Retourne le 30. Vu ces avatars, la 2° DI ne peut prendre sa position, entre Rethel et Château-Porcien que le 1er juin, s’intégrant entre la 10° DI et la 14° DI.
Hélas, les parcs d’approvisionnement ne sont pas totalement opérationnels (munitions-matériel-nourriture) ; ils sont éloignés (à 80 km) ; les déplacements se font sous la menace de l’aviation ennemie et la DCA est inexistante.


Les chars ALSACE et VERDUN sont mis à disposition de la 2° DI.
A Biermes : le 127° RI (2° DI) relève le 152° RI.
Un « crochet défensif » est créé :..Nord……éperon NE Mont de Vaux
……………………………………………….Centre……Vaux-Champagne
……………………………………………….Sud Est…..Ouest de Coulommes (liaison avec 36°DI)

1er Juin :
Le colonel BETANT félicite les chasseurs du 2° BCP pour leur action à partir de Sault-les-Rethel : « Les Diables Bleus du 2° ont rivalisé d’ardeur avec les Diables Rouges pour bouter l’ennemi hors de la partie de Rethel située au sud de l’Aisne».
Le pont de Thugny est la cible de nombreux tirs d’artillerie ennemis.
Durant la nuit le CANTAL tracté par l’ALSACE est conduit près de Perthes et remis en état.

2 Juin :
SEUIL est la cible de tirs d’artillerie et de mortiers.
3 Juin :
La nuit, des bruits de moteur sont repérés au Nord de Rethel et au Nord-Ouest vers Château- Porcien.

4 Juin :
Les Allemands utilisent des pièces d’artillerie françaises abandonnées et remises en état, notamment un obusier de 220 dont les tirs sont très précis. Ils poursuivent leurs recherches autour de Charleville et en trouvent cinq autres.

5 Juin :
Prise de fonction du général REQUIN (IV° Armée) chargé de la défense du secteur Brienne-sur-Aisne inclus à Attigny exclu.
Les Allemands utilisent deux des obusiers de 220 récupérés pour effectuer des tirs sur Rethel-Sud. Ils remettent les autres en état de fonctionnement sachant que leurs tirs sont efficaces et les munitions abondantes.

Rethel en ruine

Diverses informations signalent des préparatifs allemands pour une attaque d’ensemble, d’abord sur la Somme, puis sur le canal de St Quentin et sur l’Aisne.
Des reconnaissances du terrain sont remarquées.
Côté allemand, les préparatifs s’accélèrent : stock de matériel et de passerelles – création de sentiers – stocks de munitions (ils vont même en chercher directement en Allemagne pour aller plus vite – signe que l’intendance ne suit pas ! (600 km !!)). Tout est préparé pour établir des ponts provisoires pour des blindés.
Côté français : à Seuil, le RHIN est relevé par le LUNEVILLE. A Rethel, des tentatives de coups de main, vite repérées, sont bloquées par des tirs d’artillerie.
De 8h30 à 11h des tirs ennemis ont lieu sur le Sud de Rethel avec des pièces de 280.
Des tracts sont lancés par l’ennemi sur Cauroy, Annelles, Juniville.

 

6 Juin :
Le 310° R A est amené en renfort au Sud de Rethel.
On organise la défense arrière, sur la Retourne : abattis – barrages – points d’appui antichars dans les villages – emplacement d’armes automatiques – trous individuels.
Le VILLERS BRETONNEUX relève le VERDUN et le TÉMÉRAIRE relève l’ALSACE.

Ruines de Rethel

7 Juin :
Des canons sont positionnés à Pauvres, Vaux-Champagne, Mont-Saint-Remy, Coulommes, Leffincourt, Mazagran, Dricourt, Cauroy, Machault.
A Pauvres : 2 canons de 75 + 1 canon de 47
A Mont-Saint-Remy : 2 canons de 75 + 2 canons de 25
A Leffincourt : 2 canons de 75 + 1 canon de 47 + 1 canon de 25
A Vaux-Champagne : 2 canons de 47
A Coulommes : 1 canon de 47
A l’Ouest de Coulommes : 1 canon de 75
En défense antichars : 1 canon de 47 à Mazagran, 1 canon de 25 à Dricourt, 3 canons de 25 + 2 canons de 47 + 2 canons de 75 à Cauroy, 3 canons de 75 à Machault.

8 Juin :
L’attaque est annoncée pour le 9 à 4 h 45.
Sur ordre supérieur, des chars partent par chemin de fer de Mourmelon vers Mantes et l’après-midi, les chars de La-Neuville-en-Tourne-à-Fuy se rendent à Mourmelon.

9 Juin :
3 h 45 : déclenchement d’un violent bombardement d’artillerie (calibres 280 et 150).
L’aviation intervient à 4 h 30. Parmi les tirs se trouvent des fumigènes. Les lignes téléphoniques sont hachées mais les ER 17 et ER 22 les remplacent.
9 h : des infiltrations ennemies et des tentatives de franchissement de l’Aisne ont lieu : elles sont partout rejetées.
Guderian se rend à l’observatoire NE de Rethel mais ne constate aucune percée. Un de ses officiers d’État-Major se rend sur place et confirme. A 12 h, côté allemand, c’est donc un constat d’échec autour de Rethel.
Il se rend alors au-dessus de Château-Porcien où il rencontre les généraux Kirchner (1° PzDiv) et Schmidt (39° PzK). Ils décident de concentrer leurs efforts pour créer deux têtes de pont, à l’Est et à l’Ouest de Château-Porcien.

Ruines de Rethel

Des infiltrations ont lieu en fin d’après-midi au NE de BIERMES ce qui déclenche une contre-attaque par le 31° BCP appuyé par 5 chars. Les chasseurs reprennent le terrain perdu et font une soixantaine de prisonniers.
L’ennemi parvient à franchir l’Aisne et le canal à l’écluse de NANTEUIL et s’empare du village après de brefs combats : 180 prisonniers. Il construit aussitôt un pont provisoire sur lequel passent des blindés légers à partir de 23 h. Ruines de Rethel
Dans le même temps est réalisé un passage en Flosssack (sacs flottants) au bénéfice de la 21° ID (XIII° Armeekorps)
Au soir, le 127° RI reçoit un ordre de repli sur la ligne Biermes-Sault-Tunnel de Tagnon-Perthes (73° RI) car l’ennemi a créé une poche en aval, dans le secteur de la 2° DI.

Âpres combats à Thugny-Trugny (31° et 2° BCP)
La défense de la rive de l’Aisne est efficace : 110 postes de combat très bien organisés, des chevaux de frise et des mines quand la rive est basse.
A 2h30, une reconnaissance française s’avance au Nord de l’Aisne, vers Pargny. L’ennemi riposte par un bombardement qui dure une heure. A 5h10 de violents tirs de barrage français labourent les lignes ennemies. Des éléments des I et II/170° IR franchissent l’Aisne en deux endroits sur des canots pneumatiques mais se heurtent à une résistance française très résolue.
Toutefois, à 7 h 30, les premiers assaillants parviennent dans Thugny cote 132. Une deuxième vague suit à 7h45. Mais pas mal de leurs canots sont détruits avant d’atteindre la berge du canal. N’y parviennent que quelques éléments.
Le I/184° IR est la cible des tirs de notre artillerie et ne peut atteindre l’Aisne. Le I/167° RI subit des pertes importantes et la majorité des matériels de franchissement de la rivière sont rendus inutilisables. La 2° Compagnie parvient cependant jusqu’à l’Aisne, la traverse et attaque deux nids de mitrailleuses françaises camouflées au-delà du canal. Mais notre résistance est efficace : tous les officiers sont tués et les munitions étant épuisées, le I/167° IR se replie. Toutefois à 11 h, la seule passerelle est prise par l’ennemi et nos troupes sont assaillies de tous côtés, y compris avec des lance-flammes.
Des tirs de mortiers français parviennent à dégager le passage. A 12 h, l’avance ennemie est stoppée. Elle subit alors les tirs de sa propre artillerie gênée dans ses réglages par le brouillard qui persiste.

Le village est saccagé, les liaisons détruites, mais les Français résistent rue par rue, maison par maison. A 14h30, un groupe ennemi survient sur les pentes Sud de La Tombe. Des tirs d’artillerie le clouent au sol. Le II/170° IR se replie dans Thugny.
L’annonce (fausse) d’une attaque de blindés français entraîne le repli de l’artillerie ennemie et d’éléments du train. Ce vent de panique se répercute jusque dans Novy-Chevrières et Saulces- Montclin. L’État-Major de la 73° ID envoie des officiers et des sous-officiers pour ramener le calme et rétablir la situation.
En fin d’après-midi, une contre-attaque est engagée sur Trugny avec le 31° BCP et des chars R 35. Un renfort du 25° GRDI permet de rejeter l’ennemi au-delà de l’Aisne et de faire 35 prisonniers en 20 minutes. De nombreux ennemis sont isolés, désorientés, sans appui. Les abords du château sont entièrement nettoyés. En fin d’après-midi, l’ennemi décide de se replier derrière l’Aisne. Ses pertes sont élevées (500 ?) et 100 prisonniers restent entre nos mains. Un matériel important est récupéré dont de nombreuses munitions. Au soir, le III/184° IR est partout repoussé derrière l’Aisne. Ce bataillon a été pratiquement anéanti.
A 20 h 30, une patrouille de chasseurs soutenue par un char R 35 parcourt Trugny où 35 prisonniers sont encore capturés.
La cote 132 est totalement labourée de trous d’obus. Le 31° BCP a subi des pertes importantes : 150 au total.
Il est relevé dans la nuit par le 2° BCP.

A GIVRY des infiltrations ennemies se sont produites dans les tranchées défendues par la 10° compagnie du 35° RI. La section Heck de la 5° compagnie est envoyée en renfort à 5h30. Elle doit traverser un violent bombardement d’aviation et d’artillerie pour atteindre la passerelle du canal et la digue qui sépare le canal de l’Aisne. La section attaque à la grenade et reprend la tranchée mais le lieutenant Heck est tué. La lutte a été sévère : l’ennemi compte 12 tués, 6 blessés et 26 prisonniers et abandonne un important matériel aux Français : mitrailleuses, mortiers et munitions appropriées. Une contre-attaque ennemie survient à 11h45 qui parvient à franchir l’Aisne et à occuper un bosquet. Les Français déclenchent une pluie de grenades qui oblige l’ennemi à retraiter en laissant 45 nouveaux prisonniers. Nouvelle attaque à 13h25, à nouveau brisée par la défense française : 37 nouveaux prisonniers. Renseignée par un avion d’observation, une nouvelle attaque survient à 15 h. Elle est de nouveau repoussée laissant à nouveau 62 prisonniers et 8 blessés. Au cours de cette journée, les hommes du 35° RI ont tenu en échec toutes les attaques ennemies.
Au soir du 9 juin, le XIII° AK a réussi à franchir l’Aisne et le canal à l’Ouest de Rethel. Mais la défense française, appuyée par des chars, empêche tout élargissement pourtant nécessaire à l’ennemi pour assurer le passage du groupe blindé Guderian.
Le XVII° AK à gauche du XIII° a été tenu en échec par la résistance française. Le XXIII° AK attend des renforts et une nouvelle préparation d’artillerie pour attaquer.

10 juin : la rupture

Au 10 juin, la situation est la suivante : la 12° Armée allemande, chargée de franchir l’Aisne à Rethel, compte huit divisions d’infanterie et 4 Panzerdivision : Pz 2 et Pz 3 en premier échelon, Pz 6 et 8 en retrait.
Le XXIII° AK (corps d’armée) couvre l’espace Rethel-Attigny où il fait jonction avec le XVII° AK. Il comprend 3 divisions : la 73° ID qui relève la 21°, la 86° ID qui relève la 10° et la 82° ID qui reste en réserve. Le PC de l’État-Major est au château d’Hagnicourt. L’artillerie se compose de 63 batteries dont 24 lourdes. Chaque division comprend un bataillon et demi de Pionniers accompagné des moyens correspondants. Leur mission est de s’emparer de Pauvres et de progresser sur Sommepy et Tahure.
La 86° InfanterieDivision aligne l’IR 167, l’IR 216 et l’IR 184, la 73° InfanterieDivision l’IR 213, l’IR 186 et l’IR 270.

Ils attaquent le 10 juin sur tout le front de la 4° Armée française.

Après la réalisation d’une large poche sur Avançon par l’infanterie ennemie, les blindés lourds du groupe Guderian passent l’Aisne et le canal à Château-Porcien à 13 h et filent vers Reims, Châlons, Vitry-le-François et la frontière suisse afin d’encercler toutes les armées de l’Est et du Nord-Est.

La 14° Division d’Infanterie et le groupe de chars qui la renforce résiste aux coups de boutoir répétés. Mais en aval, les 2° et 10° Divisions d’Infanterie ne peuvent repousser d’aussi violentes attaques.
Après une préparation d’artillerie, une attaque se déclenche à 7h20 sur la route Rethel-TAGNON. A 8h30, venant de Saint-Loup-Champagne, une attaque ennemie encercle le village où nos troupes résistent. A 10h30, elle atteint les hauteurs Ouest de Perthes. Un bataillon ennemi rencontre une vive résistance au tunnel de Tagnon. Mais le I/95° IR attaque par le Nord et le 55° IR par l’Ouest. Ils s’emparent des hauteurs et encerclent la sortie du tunnel, réduisant la résistance au silence et faisant de nombreux prisonniers (une compagnie).
A 14 h 30, six bombardiers alliés attaquent l’arrière des troupes ennemies mais la Flak (DCA allemande) en abat deux dont un s’écrase dans le village.

La 1° PanzerDiv remonte le couloir de Tagnon et prend la direction de la Retourne. Elle a l’appui de l’aviation et elle est suivie par des troupes d’infanterie. Ils parviennent jusque PERTHES qu’ils finissent par encercler. Le 127° RI résiste courageusement, usant de ses deux canons de 25. C’est un combat meurtrier, maison par maison, gêné par la traitrise de l’ennemi qui attaque derrière un bouclier de prisonniers.

A RETHEL, l’ennemi renforce les unités d’attaque : l’IR 166 (82° ID) vient se joindre à la 73° ID. Dans la nuit du 9 au 10, ils traversent l’Aisne à l’Est de Rethel afin de conquérir SAULT et BIERMES. A 10 h, ACY est totalement investi par l’IR 24, ainsi que SAULT vers 13 h. A 15h30, tous les ilots de résistance de SAULT sont réduits, y compris celui de la Briqueterie, avec l’appui de quelques chars.
A 16h30 démarre une contre-attaque française avec 30 blindés, appuyés par de l’infanterie. Elle réussit à progresser mais se heurte soudain au Panzerjäger 560 (chasseurs de chars), armé de canons de 88. Huit chars moyens et quatre lourds sont détruits. L’infanterie (IR3) détruit 2 chars lourds et 6 moyens avec ses PAK (canons antichars). La contre-attaque est brisée : le reste se replie, ainsi que l’infanterie qui subit de violents tirs de mitrailleuses lourdes.
Sur l’Aisne, l’ennemi commence alors la construction d’un pont de 16 t après avoir dégagé les obstacles accumulés sur la rive gauche : 120 mines, des barrières de grenades, des abattis d’arbres. A 21h30, le pont est achevé. Il permet le passage de la 26° ID.

A TRUGNY, le 2° BCP se fait attendre. Le capitaine Barli arrive à 1h45 et annonce qu’une seule compagnie arrivera au jour. Il faut donc que le 31° RI reste encore en place !
La 73° ID, renforcée de l’IR 216, attaque mais tombe dans un tir de barrage particulièrement bien réglé. L’ennemi l’a toutefois prévu et a chargé ses troupes de relever minutieusement les positions des différentes batteries. Dès 6h, le 31° BCP subit un bombardement ennemi intense. Thugny est en feu. Les tirs d’artillerie demandés par les défenseurs sont réduits et souvent en retard. Les tentatives de franchissement de l’Aisne en canots se succèdent. A 9h, l’IR 170 attaque mais ne parvient pas à franchir le canal face à Trugny. Les tirs de l’artillerie ennemie éliminent cinq des batteries repérées et trois autres dans la matinée. Les combats font rage sur le canal. A 11h30, ils s’arrêtent. Mais des infiltrations se sont produites dans le Bois du château. La défense des villages est bien organisée : laisser l’attaquant approcher et le clouer ensuite sur place par des feux croisés. La supériorité numérique allemande finit toutefois par l’emporter.
Thugny est menacé d’encerclement car des tirs de mitrailleuses viennent aussi de la route de Doux.
Le commandement allemand est excédé de voir ses troupes bloquées devant Thugny-Trugny et en partie décimées. Il décide de faire passer des troupes à l’Ouest de Rethel et de venir attaquer les troupes françaises par l’arrière (La Tombe). L’IR 166 (82° ID) effectuera cette manœuvre le 11 matin et parviendra à l’Ouest de La Tombe.
Mais les Français appliquent l’ordre de repli le 11 matin et quittent leurs positions.
Ces combats meurtriers ont coûté cher au XXIII° AK : les 9 et 10 juin, il a perdu 90 officiers, plus de 400 sous-officiers et presque 2 000 hommes.

A GIVRY-sur-Aisne :
Dès 3 h survient un bombardement avec obus fumigènes et incendiaires. L’ennemi lance une attaque générale et franchit l’Aisne avec des Flosssak (petits canots pneumatiques).
A 4 h, la 10° Cie du 35° RI est en difficulté au pont de Givry. A 6 h, une infiltration allemande a lieu près de Montmarin : des renforts sont demandés. Diverses contre-attaques françaises, finalement appuyées par des tirs d’artillerie, rapides et efficaces (4° RA) parviennent à repousser l’ennemi jusqu’au canal puis au Nord de l’Aisne. Il finit par se replier laissant sur place beaucoup de blessés et de tués. La soirée et la nuit sont finalement calmes. Mais la situation reste très tendue.
Vu la déferlante ennemie, nos troupes ont appelé le groupement blindé Buisson (3° DCR et 7° DLM) à leur secours. Malgré divers contacts avec le PC de la 4° Armée (téléphone-radio-estafettes), ce dernier ne donne aucun signe de vie. Conscient de la gravité de la situation, Buisson décide d’intervenir : la 7° DLM, au Sud de la Retourne, la 3° DCR en direction de Perthes-Tagnon en partant de la route de Châlons. De Hauteclocque (futur général Leclerc) décide d’abord d’attaquer sur Perthes. L’ennemi dispose de nombreux antichars (PAK) qui causent de nombreuses pertes dans les rangs des chars légers (H39) et même sur certains B1 bis (déchenillement). A 20h30, le 41° BCC (chars B1bis) et le 16° Bataillon de Chasseurs Portés libèrent le 127° Régiment d’infanterie (2° DI) encerclé dans Perthes dont il ne reste que 7 officiers, 3 sous-officiers et 35 hommes !
Les chars lourds poursuivent jusqu’à la route Tagnon-Rethel avant de se replier, plusieurs chars étant ou détruits ou immobilisés. L’arrivée d’un groupe de chasseurs de chars (2° PzJägAbt 21) permet à l’ennemi de talonner les éclopés qui retraitent jusque la ferme de Pommery vers 20h30. Le 16° BCP se replie sur le Bois d’Annelles. Des chars ennemis patrouillent autour de Perthes.
L’ennemi atteint la Retourne à 14 h 15. La 1° PzDivision remonte la rivière et prend à revers la défense française qui n’a plus que la route de Châlons pour s’échapper. Le 10° BCC rejoint la 7° DLM qui bloque l’ennemi à l’Ouest de Juniville, encerclée par les Panzer à 20h. Ces derniers subissent de lourdes pertes au Sud-Ouest de la cité.
A 21 h arrive un motocycliste qui apporte un ordre de repli général de la 4° Armée enjoignant à la 7° DLM de gagner Moronvillers et Epernay à partir de 22h30. La 14° DI doit se replier sur Bignicourt, Mont-Saint-Remy et Machault. Hélas, le 16° BCP est à son tour encerclé dans Perthes. Avant le repli, les chars B1bis de Delepierre (3° DCR) se chargent de les délivrer.

Rappelons que nos troupes n’ont reçu aucun ravitaillement depuis le 8 juin….

Au soir de cette journée, 26 divisions ennemies sont prêtes à attaquer ainsi que le 41° Panzerkorps. Le XXIII° AK reste bloqué devant Thugny-Trugny. Le XIII° AK a ouvert le chemin sur Perthes et Juniville.
Le lendemain 11 juin, c’est l’avance générale. Sommepy est atteint à 6 h et la Retourne à 9h15.

Les troupes françaises ont rempli leur mission du 15 mai au 10 juin, bloquant l’ennemi sur l’Aisne, leur infligeant en de nombreux endroits de lourdes pertes en hommes et en matériel, malgré l’absence quasi totale de l’aviation française et une DCA très insuffisante. Les cimetières allemands en sont une preuve irréfutable !

 


SOURCES :

– RETHEL – Lt colonel Goyet RHA
– Bulletins archéologiques, historiques et folkloriques du Rethélois n° 61-1990/2-1991/1-1995/2
– Relation de Nicolas HENRI 4° batterie 108° RA
– Historique de Biermes par M Dupuis instituteur
– Bataille de Rethel par Henri HENRIET Col artillerie 2° DI 310° RAP
– La compagnie GAUDET
– Journal de marche du 37° BCC
– Compte-rendu du Lieutenant Ernest GAUDET
– La compagnie GAUDET
– Compagnie GAUDET 3/37
– Arrondissement d’étapes de Rethel
– Témoignage de PERETTE

Documentation allemande
– 1° PanzerDivision : der Stoss nach Süden von Rethel bis Belfort
– 29° IDmot (transmise par Robert MARCY)

Ouvrages
– La Bataille de Rethel Robert MARCY
– Le général d’Armée Leclerc de Hauteclocque – général BUISSON

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